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Observations sur le défilé militaire chinois (4)

La Chine au présent | 22.10.2015 10h27

Passage des hélicoptères au-dessus de la place Tian'anmen.

Pourquoi ce refus de Washington et Tokyo ?

Le fait que le Japon ait décliné l'invitation de Beijing montre que les frictions entre le gouvernement d'Abe et la Chine sont de nature stratégique et s'inscrivent dans la durée. Si, d'une part, un conflit ou une divergence de vues opposait la Chine et les États-Unis, le Japon n'hésiterait pas à se ranger du côté de l'Oncle Sam, comme il l'avait déjà fait à propos des questions sur la mer de Chine méridionale ou la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (AIIB). D'autre part, si un conflit d'intérêt stratégique devait éclater entre nos deux pays, le Japon ne chercherait certainement pas à trouver un compromis. Nous ne devons plus nous bercer d'illusions : désormais, il n'est plus possible d'appliquer le principe consistant à mettre de côté les litiges territoriaux pour exploiter les ressources en commun. Pourtant, ce sont les intérêts fondamentaux de toute l'Asie qui sont en jeu ! En effet, l'amitié sino-japonaise est un préalable à la garantie de la paix sur le continent asiatique. Mais l'histoire dépasse parfois le cadre de la volonté humaine. Ainsi, les relations sino-japonaises dépendent dans une large mesure de l'état des relations sino-américaines. Si un différend apparaissait entre la Chine et les États-Unis, le Japon prendrait parti pour les États-Unis. Et il est fort possible qu'un tel problème surgisse à l'heure actuelle. Par conséquent, comment surmonter les défis que pose le Japon ? C'est une vieille question toujours d'actualité pour la Chine.

De même, en refusant de venir à Beijing, le président Obama a envoyé un signal clair. Il serait fantaisie d'affirmer que Washington a décliné l'invitation de la Chine par crainte d'offenser le Japon. Effectivement, le Japon est pour les États-Unis son troisième partenaire commercial et son deuxième (voire premier) créancier. De fait, à l'heure où les États-Unis opèrent leur « retour en Asie », le Japon représente leur meilleur allié dans la région. Toutefois, les raisons de l'absence américaine au défilé de Beijing sont à chercher au-delà de cette soi-disant volonté de ne pas froisser le Japon. Car n'oublions pas : les États-Unis ont actuellement 100 000 soldats stationnés au Japon. En réalité, ce sont eux qui guident la politique étrangère du Japon. Le livre américain intitulé Le Chrysanthème et le sabre a décrit les Japonais comme étant un peuple qui opprime les faibles et craint les forts. En conséquence, les États-Unis, pays le plus puissant au monde, n'ont pas peur de s'attirer les foudres du Japon. S'ils ne sont pas venus à Beijing, c'est uniquement parce qu'ils ne voulaient pas saluer les progrès de la Chine sur le plan militaire.

Tenir une parade est un moyen particulier de célébrer une victoire passée, puisque la cérémonie dévoile nécessairement le potentiel militaire du pays organisateur. Selon le quartier général de l'armée chinoise, 84 % des armes et équipements qui ont défilé étaient présentés pour la première fois au grand public. D'un point de vue objectif, cette démonstration de force a un effet dissuasif sur les éventuels adversaires. De nos jours, la Chine est peut-être le seul pays ayant la force suffisante pour défier l'hégémonie américaine (sans pour autant avoir l'intention de le faire, cela étant une autre histoire). Alors, pour quelle raison le président américain aurait-il pu vouloir siéger aux côtés du président chinois en pareil moment ?

Peut-être parce que ce sont les États-Unis qui se sont taillé la part du lion sur la croissance chinoise pendant la trentaine d'années de réforme et d'ouverture. Alors que la Chine, autrefois « usine du monde », est devenue la deuxième entité économique de la planète, les États-Unis, premier investisseur et actionnaire, sont devenus le principal bénéficiaire des profits générés par le progrès économique de la Chine. Prenons l'exemple des portables Apple : la Chine, « usine » qui les fabrique, ne se fait que 1,8 % de marge sur les ventes, tandis que les États-Unis empochent 58,5 % des bénéfices. Néanmoins, la Chine, maintenant deuxième puissance économique mondiale, dérange de plus en plus les États-Unis, notamment parce que Beijing maintient fermement sa souveraineté financière, phénomène que je vais décrire ci-après.


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(Rédacteurs :Yin GAO, Wei SHAN)
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