Dernière mise à jour à 14h38 le 05/04
Le monde est en état d'alerte depuis un récent reportage affirmant que plusieurs pays sont à la recherche de matières radioactives volées "hautement dangereuses". De grandes quantités d'iridium-192 ont disparu aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et dans d'autres pays, provoquant des craintes que ces matières nucléaires puissent être utilisées par des terroristes pour fabriquer une bombe sale (bombe radiologique).
TOMBEES ENTRE DE MAUVAISES MAINS?
Certains extrémistes tels que les terroristes et les groupes armés sont devenus une nouvelle force à la recherche de matières nucléaires, ce qui est un grave problème négligé par le mécanisme actuel de gestion de la sécurité nucléaire, a déclaré une chercheuse chinoise de premier plan sur les affaires internationales.
Wu Chunsi, du Centre d'études américaines à l'Institut de Shanghaï des études internationales, a déclaré dans un article publié que la surveillance bâclée et le contrôle des "entités non-gouvernementales" sur les matières nucléaires sont devenus la partie la plus fragile et incertaine du système mondial de non-prolifération. Son opinion explique en partie pourquoi le Sommet sur la sécurité nucléaire (SSN) de 2016, qui s'est tenu à Washington du 31 mars au 1er avril, a mis l'accent sur les mesures visant à empêcher les terroristes d'obtenir des matières nucléaires.
L'expert nucléaire chinois Zhu Xuhui a convenu que la situation actuelle est assez grave, alors que d'énormes quantités de matières nucléaires pourraient être utilisées par des terroristes. Le monde a besoin d'être pleinement conscient de la menace, et la sécurité nucléaire est une question qui devrait être source de préoccupation sur le long terme, a déclaré M. Zhu.
Une autre menace négligée qui doit être portée à l'attention est le danger potentiel que les terroristes pourraient lancer des cyberattaques contre des centrales nucléaires, ce qui pourrait être difficile à prévoir et à empêcher, a indiqué M. Zhu.
Son avis a été soutenu par Page Stoutland, vice-président en charge des affaires scientifiques et techniques à l'Initiative contre la menace nucléaire (NTI), qui a confié à Xinhua que le danger dissimulé réside en partie dans les possibles cyberattaques visant à voler des matières et à saboter des installations nucléaires.
LE JAPON, UNE PREOCCUPATION POUR LA SECURITE NUCLEAIRE
Une autre préoccupation mentionnée par M. Zhu est liée au Japon.
Avant la crise de la centrale nucléaire de Fukushima, le Japon obtenait environ 30% de son électricité via le nucléaire. Après la catastrophe nucléaire de Fukushima, le pays a été exhorté à arrêter son usine de traitement nucléaire pour une durée indéterminée. Pourtant, cinq ans plus tard, le Japon a débuté le processus controversé de rouvrir certains de ses autres réacteurs.
Il reste à voir si le Japon, pays fréquemment frappé par les séismes, peut regagner la confiance publique dans la gestion appropriée de ses installations nucléaires. Un risque beaucoup plus grand pour la communauté internationale est le surstock de matières nucléaires du pays, a confié M. Zhu à Xinhua.
Avec un stock estimé de 48 tonnes de plutonium, assez pour fabriquer des armes nucléaires, le Japon possède bien plus de matières nucléaires que la demande de ses centrales nucléaires. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et le SSN ont appelé tous les pays à maintenir un équilibre entre l'offre et la demande de matières nucléaires.
Le Japon a été invité à réduire son stock de plutonium conformément à un accord conclu au SSN à La Haye en mars 2014 par le Premier ministre japonais Shinzo Abe et le président américain Barack Obama.
Au début du mois de mars, le Japon a retourné aux Etats-Unis 331 kilos de plutonium, y compris du plutonium de niveau assez élevé pour en faire une arme. Toutefois, les observateurs estiment que le Japon a besoin de faire plus d'efforts pour apaiser les inquiétudes internationales concernant son ambition nucléaire, compte tenu du passé de guerre et d'agression du pays.
Le Japon a subi une catastrophe nucléaire en 2011, quand un séisme de magnitude 9 et un tsunami ont frappé le nord-est du pays. Des craintes publiques, telles que des préoccupations sur la radioactivité des fruits de mer, se font encore sentir au-delà des frontières japonaises.
UN COMBAT QUE L'ON NE PEUT PAS SE PERMETTRE DE PERDRE
Ayant connu des catastrophes nucléaires majeures, dont Fukushima et Tchernobyl en 1986, l'humanité a réalisé que la technologie nucléaire a ses dangers et ses vulnérabilités. Un consensus international est nécessaire sur la façon de coopérer pour lutter contre la crise nucléaire, dont l'impact va souvent au-delà des frontières.
Jin Canrong, vice-doyen de l'Ecole d'études internationales à l'Université Renmin de Chine, a déclaré que davantage d'accords institutionnels et de documents contraignants sont nécessaires pour lutter contre les risques de sécurité nucléaire.
La situation actuelle de la sécurité nucléaire est confrontée à de nombreux défis. Il semblerait que le plus grand défi soit la prolifération nucléaire recherchée par certains gouvernements et extrémistes, mais la possibilité d'accidents nucléaires ne peut pas non plus être négligée, a indiqué M. Jin.
Dans un rapport intitulé "Cinq ans après Fukushima, rendre l'énergie nucléaire plus sûre", publié sur le site internet de l'AIEA, le directeur général de l'AIEA Yukiya Amano a déclaré que les accidents nucléaires peuvent dépasser les frontières nationales, et qu'il est "largement reconnu que tout ce qui est humainement possible doit être fait pour veiller à ce qu'aucun autre accident de ce genre ne se reproduise".
Certes, la technologie nucléaire est une arme à double tranchant et les pays peuvent avoir leur propre évaluation de ses risques et défis potentiels, mais la sauvegarde de la sécurité nucléaire mondiale est la bataille commune que le monde ne peut se permettre de perdre.