Dernière mise à jour à 08h56 le 15/12
Anatoli Brouchkov est un homme à la voix douce et aux cheveux d'argent, et quand il laisse échapper un petit rire réservé, ses yeux brillent. Si vous l'aviez rencontré dans la rue, vous n'auriez jamais deviné qu'il s'était lui-même injecté une souche de bactéries vieille de 3,5 millions d'années, juste pour voir ce qui se passerait. Ce savant spécialiste du pergélisol, également connu comme géocryologue, actuellement en poste à l'Université de Moscou, dit se sentir très bien. En fait, il dit même qu'il se sent plus sain et moins fatigué que jamais. Il dit aussi n'avoir pas eu la grippe en deux ans, et selon lui, cela peut –ou non- avoir quelque chose à voir avec ces bactéries préhistoriques qu'il s'est injectées dans le corps.
Les bactéries en question sont connues comme des Bacillus F, que M. Brouchkov a sorties d'un échantillon de pergélisol du Mont des Mammouths dans la région de Iakoutsk, dans le Nord de la Sibérie, en 2009. M. Brouchkov estime que cette bactérie a non seulement été préservée depuis des millénaires, mais a en plus prospéré dans ces conditions de conservation. Selon lui, la Bacillus F dispose d'un mécanisme qui lui a permis de survivre pendant longtemps sous la glace, et ce même mécanisme pourrait être utilisé pour prolonger la vie humaine, et peut-être même, un jour, pour toujours. Dans les tests, M. Brouchkov dit que la bactérie a permis à des souris femelles de se reproduire à un âge beaucoup plus âgé que les souris normales. Les mouches des fruits, a-t-il également dit au Siberia Times, ont aussi bénéficié d'un « impact positif » de l'exposition à la bactérie.
Le problème est qu'il ne sait toujours pas quel est exactement ce mécanisme. M. Brouchkov n'est pas le seul scientifique à analyser des bactéries anciennes tirés des profondeurs glacées des régions les plus septentrionales du monde, mais il est peut être l'un des seuls à le faire dans une quête de la vie éternelle. Depuis des décennies, les scientifiques récupèrent des bactéries dans le permafrost sibérien et analysent leurs propriétés. L'an dernier, par exemple, des chercheurs de l'Académie russe des Sciences ont séquencé le génome d'un plasmide résistant aux médicaments isolé dans des bactéries trouvées dans le pergélisol. Ces virus anciens sont incroyablement complexes, avec des centaines et des centaines de gènes codant les protéines ; par exemple, la grippe A en a seulement 8… en bref, il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas à leur sujet.
De plus, Anatoli Brouchkov ne serait pas le premier à bénéficier des effets de ce microbe antédiluvien : à cause de la décongélation du permafrost ces dernières années, dit-il, « la bactérie a commencé à se répandre dans l'environnement et même dans les réserves d'eau potable. Donc, la population locale, les Iakutsk, absorbent cette bactérie depuis longtemps et on constate qu'ils vivent très vieux ». Cela étant, il reste beaucoup à faire pour comprendre « les mécanismes génétiques qui assurent la vitalité de cette bactérie » et déterminer s'il existe ou non des effets secondaires potentiellement dangereux pour la santé, ce qui, pour un germe dont le savant russe dit qu'il pourrait améliorer la santé et prolonger la vie, serait un inconvénient de taille et pour le moins gênant...