Un nouveau drame fatal illustre le problème des enfants laissés seuls

( Source: le Quotidien du Peuple en ligne )

12.06.2015 15h50

Photo : Des pensionnaires suivent un cours d’éducation physique à l'école primaire du canton de Shicheng du Comté de Pingshun (Province du Shanxi), le 26 mai 2015. Les élèves de l'école sont le plus souvent des enfants laissés sur place par leurs parents qui travaillent à l'extérieur de leur ville natale. [Photo / Xinhua]

La police de la Province du Guizhou a récemment confirmé que quatre frères et sœurs sont morts après avoir consommé des pesticides.

Selon les experts qui se sont exprimés jeudi, cette affaire dans laquelle quatre frères et sœurs sont morts après avoir été laissés sans soins parentaux, dans le contexte actuel de l'urbanisation que connait la Chine, expose à nouveau le sort difficile de ces jeunes.

La police de Bijie, dans la Province du Guizhou, a confirmé que les quatre enfants sont morts mardi après avoir ingéré des pesticides.

Selon la police, les quatre enfants, âgés de 5 à 13 ans, ont avalé des pesticides dans leur maison de Cizhu, un village du quartier de Qixingguan de la ville de Bijie, mardi à 11 h, dans ce qui semble être une tentative de suicide et sont décédés plus tard dans un hôpital.

Les enfants étaient sans soins parentaux depuis le mois de mars après que leur père, Zhang Fangqi, les ait laissés dans le village pour prendre un emploi loin de chez eux. Leur mère, Ren Xifen, avait pour sa part quitté la maison en mars de l'année dernière après une violente querelle avec son mari.

Ces décès interviennent deux ans et demi après un incident lors duquel cinq enfants des rues avaient été retrouvés morts dans une poubelle dans la même ville de Bijie. Retrouvés plus d'une semaine après avoir disparu, ils avaient allumé un feu pour rester au chaud dans la nuit du 15 novembre 2012, avant de mourir d'un empoisonnement au monoxyde de carbone, avait alors indiqué la police.

À la date de jeudi, les autorités locales n'avaient toujours pas été en mesure d'entrer en communication avec les parents des quatre frères et sœurs.

Prenant soin d'eux-mêmes, les frères et sœurs vivaient avec 500 kg de maïs stocké et 25 kg de viande en conserve près d'eux dans une maison de trois étages.

Leur père avait envoyé de l'argent sur un compte bancaire qu'il avait ouvert pour son fils aîné, a indiqué la police. Le gouvernement local avait également fourni à la famille une allocation de subsistance minimum depuis 2012, et le compte possédait plus de 3500 Yuans (560 Dollars US).

Selon Pan Ling, un parent éloigné des enfants, ils étaient socialement en retrait et séchaient souvent l'école. Les grands-parents, qui, autrement, auraient sans doute pris soin des enfants, étaient décédés.

L'incident de mardi est au moins le sixième cas d'enfants laissés sans soins parentaux s'étant apparemment suicidés ou ayant tenté de le faire dans tout le pays depuis 2008.

Le gouvernement de la ville de Bijie avait annoncé après l'incident de 2012 qu'il allait lancer un fonds spécial de 60 millions de Yuans (9,7 millions de Dollars US) chaque année pour aider les enfants laissés sans soins parentaux.

Chen Changxu, maire de Bijie, avait dit en novembre 2012 que l'incident de cette année-là avait révélé les failles de la gestion sociale de la ville et les soins aux enfants « laissés en arrière ».

Il avait alors promis que la ville établirait un système d'archivage afin de garder une trace de tous les enfants sans protection parentale et ferait en sorte qu'aucun enfant ne soit laissé dans les rues.

Cependant, selon Tang Jun, chercheur en politique sociale à l'Académie chinoise des sciences sociales, l'incident de mardi « a montré que les mesures d'intervention du gouvernement ont échoué. Le rôle des parents est irremplaçable, et la meilleure façon de faire est de veiller à ce que les enfants partent avec leurs parents quand ceux-ci migrent vers d'autres villes pour travailler ».

« Depuis des décennies, nous nous contentons d'une main-d'œuvre de travailleurs migrants. Si nous ne leur fournissons pas plus d'avantages sociaux, d'autres cas similaires auront lieu, encore et encore », a-t-il dit.

Li Yifei, directeur adjoint Centre de recherche scientifique en communication et en éducation de l'Université normale de Beijing, estime pour sa part que ces enfants « laissés en arrière » ont beaucoup plus de risques de connaitre des problèmes psychologiques.

« Intervenir est également difficile parce qu'en général les enfants ne montrent pas de comportement anormal, même si vous essayez de leur poser des questions. Toutefois, en général, ils esquivent ou réagissent fortement quand on leur pose des questions sur leurs parents », a-t-il souligné.

Le rôle des enseignants peut aussi être crucial, a-t-il ajouté. « Les enseignants devraient recevoir une formation psychologique pour surveiller l'état mental des enfants. La clé est d'identifier les enfants susceptibles d'avoir des problèmes de santé mentale et de s'assurer qu'il y aura une intervention en temps opportun ».

« Cependant, il y a peu d'enseignants ou de travailleurs psychologiques dans les régions où ces enfants laissés seuls se concentrent », a-t-il précisé.