Dernière mise à jour à 10h01 le 16/06
Lorsque les médias évoquent la politique des Etats-Unis au Moyen-Orient, le mot "échec" revient très souvent, comme l'illustre une récente analyse percutante de la chaîne qatarie Al Jazeera, selon laquelle "les Etats-Unis perdent du terrain dans la région" et "ils ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes".
Ce point de vue prévaut au Moyen-Orient. Pendant des décennies, les Etats-Unis, qui se trouvent à environ 10 000 km de la région, se sont ingérés imprudemment dans les affaires régionales, provoquant des conflits, des confrontations, des guerres et de la pauvreté. L'hégémonie américaine a inévitablement conduit au découplage de la région par rapport à l'Oncle Sam.
En menant des guerres inconsidérées, l'hégémonie militaire américaine a provoqué des désastres sans précédent au Moyen-Orient. En 2003, les Etats-Unis ont déclenché la guerre d'Irak en s'appuyant sur des preuves fabriquées de toutes pièces, en l'absence d'autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies et en dépit de la forte opposition de la communauté internationale. Selon Statista, une base de données mondiale, environ 209 000 civils irakiens sont morts dans la guerre et les conflits violents qui ont suivi entre 2003 et 2021, et environ 9,2 millions d'Irakiens sont devenus des réfugiés ou ont été contraints de quitter leur pays.
Parallèlement, les Etats-Unis soutiennent depuis longtemps l'infiltration d'organisations non gouvernementales et d'agents dans la société du Moyen-Orient et ont modifié à plusieurs reprises les voies de développement des pays du Moyen-Orient au moyen de "révolutions de couleur". S'appuyant sur le soutien financier continu du gouvernement américain, la Fondation nationale pour la démocratie a incité à des révolutions de couleur en Egypte, au Yémen, en Jordanie, en Algérie, en Syrie et dans d'autres pays en finançant des individus et des groupes pro-américains, et a été le principal artisan du "printemps arabe".
Les Etats-Unis ont également abusé des sanctions pour s'imposer au Moyen-Orient. Dans le but de renverser la République islamique d'Iran, Washington a imposé et intensifié les sanctions contre le pays pendant plus de quatre décennies, ce que Téhéran a qualifié "d'actes inhumains, criminels et terroristes".
Les experts des droits de l'homme des Nations unies ont fait écho au cri de Téhéran. Après sa visite en Iran en mai 2022, Alena Douhan, rapporteure spéciale de l'ONU sur l'impact négatif des mesures coercitives unilatérales sur la jouissance des droits de l'homme, a conclu que les sanctions, les sanctions secondaires et diverses formes de surconformité avaient un impact négatif important sur l'économie du pays, conduisant à de "graves violations des droits de l'homme et à des défis humanitaires".
La Syrie a également été victime des sanctions américaines, dont les effets néfastes ont été mis en évidence après le tremblement de terre dévastateur de février, lorsque les sanctions américaines ont bloqué le travail humanitaire dans le pays déchiré par la guerre.
Les équipements de secours étant interdits par les Etats-Unis, les Syriens ont déblayé les décombres à mains nues et avec les outils les plus simples, a rapporté le ministère syrien des Affaires étrangères, ajoutant que les Syriens n'avaient pas non plus accès aux médicaments et à l'équipement médical dont ils avaient besoin.
Le manque de respect est également un mot-clé dans le souvenir amer de l'engagement de la région avec les Etats-Unis. Les hommes politiques à Washington ont même utilisé des mots insultants tels que "paria" pour décrire les pays de la région et ont proféré des menaces répétées lorsque leurs propres souhaits n'étaient pas satisfaits, ignorant la fierté nationale et l'autonomie stratégique des peuples de la région.
Dans un sondage réalisé en 2022 dans 14 pays arabes par le Centre arabe pour la recherche et les études politiques, basé à Doha, 78% des personnes interrogées ont désigné les Etats-Unis comme la principale source de menace et d'instabilité dans la région.
Il n'est pas surprenant que de plus en plus de pays du Moyen-Orient refusent de recevoir des ordres de Washington. Alors que la crise ukrainienne ne cesse de s'aggraver, la plupart des pays du Moyen-Orient ont refusé de rejoindre le "camp anti-russe" dirigé par les Etats-Unis. En outre, compte tenu de leurs propres intérêts nationaux, l'Arabie saoudite et d'autres pays du Golfe ont montré peu d'intérêt à coopérer avec les Etats-Unis sur les questions pétrolières.
Washington a notamment été choqué par la détente Téhéran-Riyad négociée par Beijing après que le président américain Joe Biden a effectué une tournée au Moyen-Orient pour rallier des soutiens afin de contrer ce qu'il a appelé les "menaces iraniennes". Une vague de réconciliations, suivie du retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe, déferle sur le Moyen-Orient, les pays arabes se rendant compte que l'ingérence américaine n'a fait que plonger la région dans l'instabilité et le chaos.
Pour préserver l'influence déclinante des Etats-Unis au Moyen-Orient, les hauts responsables américains se sont empressés de visiter les pays du Moyen-Orient, mais ce qui les préoccupait le plus s'avérait être de savoir qui remplirait le soi-disant "vide de pouvoir" laissé par les Américains dans la région. Les Etats-Unis tentent toujours de manipuler le Moyen-Orient comme un pion dans leur jeu géopolitique.
La politique étrangère américaine a "perdu toute flexibilité", car elle est "dirigée par une élite qui fonctionne en prononçant des discours pour plaire à ses électeurs - et qui semble incapable de comprendre que le monde change, et vite", a commenté le Washington Post.
Au moment même où le monde se réjouit de la réconciliation au Moyen-Orient, les Etats-Unis ne se sont pas contentés de remettre en question ni même de critiquer verbalement l'évolution de la situation, ils ont également continué à lancer des frappes aériennes contre la Syrie, s'opposant ouvertement aux besoins de paix et de développement des pays de la région. Les réactions de Washington ont été méprisées par les populations du Moyen-Orient. "Les Arabes n'écoutent pas les étrangers qui ont joué un rôle destructeur dans le monde arabe au cours des dernières décennies", a affirmé Ebrahim Hashem, un analyste des Emirats arabes unis.
Si les Etats-Unis continuent d'être hégémoniques, ils se retrouveront sans chaise lorsque la musique s'arrêtera.