Les violences perpétrées par des groupes extrémistes tels qu'al-Qaïda et l'Etat islamique (EI) au Moyen-Orient n'ont cessé de faire la une des journaux avec des titres sanglants en 2014.
Les terroristes ont procédé à des exécutions brutales d'otages et ont menacé de briser les frontières et l'ordre politique dans la région, et ces groupes extrémistes sont ainsi devenus un facteur important qui rebat les cartes de la région.
La montée en puissance de l'idéologie extrémiste, qui a été en partie attribuée aux interventions militaires occidentales dans des régions à majorité musulmane comme l'Irak et l'Afghanistan, a été stimulée pendant les soulèvements du Printemps arabe et n'a montré aucun signe de ralentissement depuis, selon des analystes arabes.
CRÉATION D'UN ÉTAT ISLAMIQUE
Depuis la chute de son ancien dirigeant Mouammar Kadhafi provoquée par des opérations militaires dirigées par l'OTAN en 2011, la Libye est plongée dans les luttes politiques internes et de vastes pans de son territoire sont tombés aux mains d'al-Qaïda et d'autres groupes radicaux.
Au Moyen-Orient, la puissance du groupe terroriste notoire de l'Etat islamique dépasse les frontières et pose une menace imminente aux sociétés du monde arabe. La création du groupe pourrait remonter à 2006, année où al-Qaïda a annoncé la création de l'Etat islamique en Irak (EII).
Début 2013, l'EII est entré en Syrie et a participé à la guerre civile contre le gouvernement du président syrien Bachar al-Assad. Plus tard, le groupe a annoncé sa fusion avec un groupe syrien lié à al-Qaïda, le Front al-Nosra, sous le nouveau nom d'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL).
En février 2014, al-Qaïda a déclaré avoir coupé les ponts avec l'EIIL, dirigé par Abou Bakr al-Baghdadi. En juin, l'EIIL, qui s'était emparé de vastes territoires en Syrie et en Irak, a déclaré l'établissement d'un califat islamique et s'est rebaptisé "Etat islamique" (EI).
"La déclaration de l'établissement d'un califat était une manoeuvre importante, car elle pousserait les groupes extrémistes islamiques et ceux qui sont idéologiquement proches du groupe à prêter allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi", a déclaré à Xinhua Ibrahim al-Ameri, professeur de politique d'une faculté de Bagdad.
Selon M. Al-Ameri, l'EI et al-Qaïda se fondent sur le même système intellectuel et idéologique, mais l'EI a tendance à être plus violent, même dans ses relations avec d'autres groupes islamiques adversaires.
"L'EI semble plus brutale dans le traitement de ses détenus et procède à de nombreuses exécutions et décapitations de masse contre des soldats et des membres des forces de sécurité, que ce soit en Syrie ou en Irak", a noté M. al-Ameri.
MONTÉE EN PUISSANCE DES GROUPES EXTRÉMISTES
Le terrorisme ne peut prospérer sans un environnement favorable. Malheureusement, les questions économiques et sociales, en particulier la pauvreté, l'ignorance et le taux élevé de chômage dans la région arabe offrent un milieu propice au développement du terrorisme.
Le gouvernement irakien n'est pas parvenu à apporter la stabilité au pays, car il a placé les conflits interconfessionnels et les dissensions politiques avant la bonne gouvernance.
"L'approche de [l'ancien Premier ministre irakien Nouri] Maliki à l'égard des sunnites a poussé le groupe al-Qaïda, qui s'est rebaptisé "Etat islamique", à intensifier les attaques contre la communauté chiite et l'Etat irakien. Une fois de plus, les zones à majorité sunnite de l'Irak sont devenues des terrains de recrutement pour le groupe terroriste", a indiqué Najib al-Jubouri, un commentateur politique.
En outre, l'Occident a joué un rôle primordial dans l'augmentation des militants de l'EI dans le monde arabe et le soutien à ces derniers, a indiqué Hmaidi Abdallah, un analyste politique syrien.
"L'Occident et les Etats-Unis se sont appuyés sur les groupes terroristes [...] L'invasion américaine en Irak avait favorisé la réapparition de groupes terroristes. Le Printemps arabe, qui a éclaté en 2011, a également permis aux groupes radicaux de s'épanouir grâce aux violences qui ont suivi", a-t-il estimé.
M. Abdullah a ajouté que les pays occidentaux avaient soutenu les groupes extrémistes en Syrie dans l'objectif de faire tomber le régime de Bachar al-Assad, tout comme ils avaient fait en Afghanistan face à l'URSS.
M. Abdullah a déclaré que les Etats-Unis et leurs alliés n'avaient pas vraiment l'intention d'apporter la démocratie dans la région. Ils se sont simplement rangés aux côtés de ceux qui pouvaient faire progresser leurs intérêts, quels qu'ils soient, a-t-il souligné.
M. al-Jubouri partage l'avis de M. Abdullah et a ajouté qu'une telle situation favorisait l'apparition du terrorisme.
L'émergence d'al-Qaïda et de l'EI résulte d'une part d'un déséquilibre dans les relations entre le monde islamique et les Etats-Unis et d'un manque d'options pacifiques dans la correction d'un tel déséquilibre d'autre part, a analysé M. al-Ameri.
La politique d'unilatéralisme adoptée par les Etats-Unis après les attentats du 11 septembre 2001 a semé les graines de la violence, lesquelles ne sauraient être déracinées avant plusieurs décennies, a-t-il jugé.
Pour sa part, M. al-Jubouri a également reproché aux Etats-Unis de recourir à une approche "deux poids, deux mesures" dans le règlement des affaires mondiales.
"Les Américains ont apparemment leur propre ensemble de règles pour définir les actes de terrorisme et les utilisent ensuite comme piètre excuse pour s'ingérer dans les affaires intérieures d'autres pays", a-t-il déclaré.
UNE APPROCHE GLOBALE NECESSAIRE POUR VAINCRE LE TERRORISME
Pour vaincre l'EI et d'autres groupes terroristes opérant dans la région, une stratégie internationale globale est nécessaire. "Il y a des approches internes et externes pour combattre l'EI en Irak et dans le monde. Quant au gouvernement irakien, il est important d'apporter la paix et la tranquillité au pays par des moyens militaires, mais il est encore plus important d'initier un dialogue politique entre toutes les factions irakiennes et d'assurer l'égalité des chances entre tous les Irakiens", a déclaré M. al-Ameri.
"Cela doit être fait si le gouvernement irakien souhaite mettre fin au cycle de la violence et aux conflits interconfessionnels et ethniques", a-t-il ajouté.
Par ailleurs, les Etats-Unis ne devraient pas s'autoproclamer chefs de file de la lutte contre le terrorisme, car ils traitent depuis longtemps les différentes affaires mondiales avec une approche deux poids deux mesures, a-t-il poursuivi.
"Les Etats-Unis devraient agir au sein du système des Nations Unies, et non unilatéralement", a-t-il estimé.
Les politiques occidentales doivent être révisées pour parvenir à une coopération honnête dans la lutte contre le terrorisme, sans quoi les puissances occidentales subiront les conséquences du terrorisme lorsque les groupes radicaux occuperont la région arabe et y prospéreront, a-t-il averti.
"Les pays occidentaux doivent revoir leurs politiques au Moyen-Orient. Sinon, ils paieront pour avoir créé un monstre gigantesque qui sera difficile à circonscrire dans une certaine zone géographique [...] Nous voyons que l'Etat islamique prévoit déjà de conquérir l'Europe", a déclaré Maher Murhej, chef du Parti de la jeunesse syrienne.
L'ONU et son Conseil de sécurité devraient jouer un rôle de chef de file dans la lutte mondiale contre le terrorisme, a souligné M. al-Jubouri, qui a ajouté que cela serait la seule façon de maintenir une unité, d'assurer une coordination efficace et de prendre des actions concertées dans la lutte contre le terrorisme.