Maintenant que la nouvelle Commission européenne (CE) de Jean-Claude Juncker a finalement été approuvée par le Parlement européen (PE), le vrai travail commence.
A partir du 1er novembre, les 27 commissaires, plus Juncker élu président de la CE, prendront leurs fonctions.
Déclarant que c'est la dernière chance pour l'Union européenne (UE) à se reformer, Juncker a affirmé que sa Commission aurait une configuration nouvelle et qu'elle fonctionnerait différemment. "Ce ne sera pas la simple somme de ses membres, ma Commission sera une vrai équipe", a-t-il ajouté."Nous ne travaillerons pas en silos, en clusters ou selon les frontières délimitées par les portefeuilles, nous travaillerons comme un corps politique et collégial. Je veux une commission politique et exécutive, qui agit pour le bien public, au service des citoyens européens".
"A l'heure où les citoyens perdent la foi dans nos institutions, où les extrémistes de gauche et de droite nous mettent l'épée dans les reins et où nos concurrents prennent des libertés à notre endroit, il est temps de donner un souffle nouveau au projet européen", a-t-il déclaré hardiment.
D'énormes défis attendent l'UE, d'abord et avant tout il faut remettre l'économie sur les rails. Juncker a rejeté le choix entre les réformes structurelles, la discipline budgétaire et l'investissement, en disant que l'Europe avait besoin d'une combinaison des trois pour relancer l'activité économique. Toutefois, il a réitéré la nécessité de combler le "déficit d'investissement".
"L'investissement dans l'UE a chuté de 500 milliards d'euros (630 milliard de dollars), soit de 20%, depuis son niveau record de 2007. Nous faisons face à un déficit d'investissement que nous devons nous efforcer de combler. L'Europe peut contribuer à cet effort."
Il a promis de présenter un ambitieux train de mesures doté d'un budget de 300 milliards euros en faveur d'investissements destinés à relancer l'emploi, la croissance et la compétitivité d'ici Noël, plus tôt que le calendrier initial prévu pour fin janvier 2015.
"Vous avez ma parole que les membres de ma commission et moi-même nous attellerons jour et nuit à cette tâche dès notre entrée en fonction", a-t-il déclaré.
Un aspect important de ce projet économique sera le déverrouillage du marché numérique de l'UE, qui est actuellement sclérosé par des règles qui diffèrent souvent entre les 28 Etats membres.
"Chaque jour qui passe voit l'Europe perdre du terrain, faute d'exploiter le formidable potentiel de son immense marché unique du numérique. Des emplois ne sont pas créés, alors qu'ils devraient l'être. Les idées sont inscrites dans l'ADN de l'économie européenne! Or, leur concrétisation n'est pas à la hauteur de ce qu'elle pourrait être. Il nous appartient d'améliorer la situation à cet égard," a-t-il dit.
La nouvelle CE va faire face à un autre grand défi: les négociations avec les États-Unis sur le partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement (TTIP).
Une impasse majeure réside dans le règlement des différends entre investisseurs et États. Cela donnerait la possibilité aux sociétés américaines qui investissent en Europe le pouvoir de contourner les tribunaux européens et de contester les gouvernements nationaux directement devant les tribunaux internationaux, s'ils trouvent que les lois dans des domaines tels que la santé publique, ou la protection environnementale ou sociale, portent atteinte à leur droit de faire du commerce.
Juncker a réaffirmé que sa commission "n'acceptera pas que la compétence des États membres de l'UE soit limitée par des régimes spéciaux applicables aux litiges entre investisseurs et États. L'Etat de droit et le principe d'égalité devant la loi doivent s'appliquer aussi dans ce contexte".
Il a déclaré que l'accord soumis par la CE au Parlement européen pour approbation ne restreindrait pas l'accès aux juridictions nationales. Il ne sera pas permis aux "tribunaux secrets" d'avoir le dernier mot dans les différends entre investisseurs et Etats.
Juncker a demandé à Frans Timmermans, en sa qualité de premier vice-président chargé de l'Etat de droit et la Charte des droits fondamentaux, de le conseiller sur le sujet. "Il n'y aura aucun accord sur les différends entre investisseurs et Etats dans le TTIP si la Frans ne le soutient pas non plus," a-t-il ajouté. "Je suis convaincu qu'avec votre appui, nous pouvons négocier avec les Etats-Unis un accord commercial ambitieux dans ce sens, un accord qui respecte pleinement les intérêts européens et l'Etat de droit."
Potentiellement, l'une des tâches les plus difficiles pour Juncker dans les mois à venir, sera le désir du Premier ministre britannique David Cameron de renégocier les termes d'adhésion du Royaume-Uni à l'UE. Cameron a joué sa réputation en demandant un certain nombre de concessions à Bruxelles à la veille des élections générales de l'année prochaine en Grande-Bretagne.
La plus importante des concessions est de limiter la libre circulation des citoyens européens dans l'UE. Mais Juncker est déterminé à maintenir la liberté de mouvement qu'il qualifie d'"un pilier de l'UE". "Si nous restreignions la libre circulation, d'autres libertés (du marché unique de l'UE) seraient également menacées," a-t-il déclaré.