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67 millions de chats en Chine : une « économie du ronron » en pleine croissance

le Quotidien du Peuple en ligne | 19.03.2019 09h22

Que recèle ce nom, pardon, cette tasse ?

Un monde de ronrons et surtout un joli paquet d'argent, voilà ce que la chaîne de cafés Starbucks voit au minimum dans le dernier article qu'elle vient de proposer. Ce produit, c'est une tasse en porcelaine vendue au prix de 199 yuans (29,66 dollars) faite sur mesure pour les chats domestiques -ils sont 67 millions en Chine !

Le nouveau produit a été rendu nécessaire par l'économie en pleine croissance des animaux de compagnie en Chine, où les ventes de produits et services liés aux animaux de compagnie ont atteint 172,2 milliards de yuans en 2018.

Selon un récent rapport de la société de conseil Frost & Sullivan China, la taille du marché de l'année dernière était trois fois supérieure à celle de 2013 et elle devrait atteindre 472,3 milliards de yuans d'ici 2023. Le segment du marché des chats de compagnie, d'une valeur de 60 milliards de yuans, est le deuxième marché le plus important après celui des chiens de compagnie (98,5 milliards de yuans). Il devrait être le plus dynamique.

Rien d'étonnant dont que Starbucks ait jugé bon de lancer un produit spécialisé destiné à ce marché. Mais il est peut-être très possible que l'entreprise n'ait pas anticipé la formidable réponse qui a été constatée. Dès l'instant où Starbucks a lancé sa « tasse patte de chat » en édition limitée, ce fut une véritable frénésie parmi les consommateurs chinois qui possèdent des chats de compagnie.

Dans des scènes qui n'ont pas été sans rappeler les files d'attente dragonesques des pré-lancement de smartphones dont le seul prix les rend snobs, les propriétaires de chats sont restés debout toute la nuit devant les magasins Starbucks des villes de Chine une journée avant le lancement officiel de la vente de la tasse le 26 février.

Certaines femmes propriétaires d'animaux, exaspérées par l'attente qui semblait n'en plus finir, en sont venues à se crêper le chignon, tandis que d'autres se laissaient aller à des écarts de langage en apprenant que les tasses si convoitées étaient en quantité limitée.

Selon les spécialistes du marché, cet engouement et cette forte demande sont imputables aux vidéos et images alléchantes publiées sur les médias sociaux par les principaux leaders d'opinion ou « KOL », ou encore influenceurs.

Le 28 février, Starbucks a organisé un concours en ligne -ou une vente flash, si vous voulez- pour ces tasses en édition limitée. Les consommateurs ont dû attendre de longues heures devant leur ordinateur simplement pour cliquer sur « acheter » plusieurs fois de suite sur une période de quatre jours, jusqu'au 3 mars. Petit problème, des millions de leurs semblables ont fait exactement la même chose au même moment. Ce qui a eu pour conséquence que la plupart de leurs tentatives ont été vouées à l'échec, les acheteurs dépassant largement le nombre de tasses spéciales mises en vente.

Les tasses pattes de chats ont toutes été vendues en moins de temps qu'il faut pour le dire après l'ouverture de la vente.

Des consommateurs déçus ont accusé Starbucks de recourir au « marketing de la faim », une stratégie qui vise à augmenter la demande en limitant délibérément l'offre, une accusation démentie par la chaîne de cafés.

L'épisode de la tasse Starbucks est la dernière preuve que les animaux de compagnie, en particulier les chats, attirent les consommateurs fortunés en Chine, une économie qui voit une augmentation de la consommation dans tous les secteurs -un sujet qui a d'ailleurs suscité un fort intérêt chez les législateurs et les conseillers politiques chinois qui ont récemment assisté aux sessions annuelles de la plus haute législature du pays et du principal organe consultatif politique du pays.

Les raisons pour lesquelles l'économie des chats est florissante en Chine sont nombreuses. D'une part, les chats de compagnie sont de bons anti-stress. Et en ces temps agités et stressants dans les zones urbaines, les experts pensent que les félins pourraient s'avérer très utiles.

Un point de vue que partage Huang Xinyi, 28 ans, producteur de films à Beijing. « Chaque fois que mon chat ronronne contre moi, me donne un coup de tête au visage et se frotte contre ma jambe, je veux le serrer dans mes bras et l'embrasser partout ».

Dans sa génération des 25 à 35 ans, beaucoup d'entre eux poursuivent une carrière bien remplie dans des villes éloignées de leur ville d'origine. « Je me sens parfois seul, mais mon chat a toujours été une bonne compagnie », a-t-il dit, ajoutant « De plus, les chats sont plus indépendants. Je n'ai pas à sortir promener mon chat tous les jours, mais je joue avec lui chaque fois que je trouve un peu de temps libre ».

C'est important pour la plupart des jeunes qui luttent pour trouver un équilibre travail-vie dans les zones urbaines du fait de leur mode de vie trépidant.

Selon un rapport de Frost & Sullivan China, élever un chat comme animal de compagnie coûte un peu moins cher que d'avoir un chien. Le rapport précise que les propriétaires de chats dépensent environ 3 117 yuans par animal chaque année en moyenne, alors que le chiffre correspondant pour un chien est de 4 723 yuans.

Une grande partie des dépenses d'un animal de compagnie concerne la nourriture. Pour un chat, elles se montent à 1 340 yuans environ, les soins médicaux se montant à 742 yuans en moyenne.

« Environ 41% des 99,8 millions de foyers chinois possédant des animaux domestiques ont maintenant des chats, et leur nombre ne cesse de croître », a déclaré Neil Wang, président de Frost & Sullivan China. Par ailleurs, toujours d'après le rapport, en plus des 67 millions de chats de compagnie, il y en a encore plus, adoptés ou donnés par des amis et la famille.

Tout cela a engendré une sorte de culture du chat, couvrant une variété d'activités commerciales. Par exemple, des applications spécialisées proposent un service appelé « cloud petting », qui permettent à ceux qui ne possèdent pas de chat d'en chouchouter un de manière virtuelle. Ces derniers peuvent suivre les « célébrités félines » sur les plates-formes de médias sociaux.

« Erdou » et « Guazi » sont deux célébrités de ce type sur Douyin, l'une des plateformes de partage de vidéos les plus populaires de Chine. Ils appartiennent à la même personne qui a posté leurs vidéos sur un compte appelé « Liu Erdou qui peut parler ». Le compte est rapidement devenu très populaire, attirant plus de 46 millions de followers et 390 millions de « pouces en l'air » (ou « likes »).

La gestionnaire du compte a commencé à recevoir des offres publicitaires de marques reconnues. Cette dernière lui a demandé de donner son soutien à certains produits dans ses vidéos courtes.

Ce n'est qu'une façon de gagner de l'argent dans l'économie des chats. Car de nombreuses personnes fabriquent des produits ou offrent des services qui rendent la vie des chats plus agréable et leurs propriétaires plus heureux.

Par exemple, un masseur électrique pour le cuir chevelu coûte environ 120 yuans et un « FURminator » (peigne de toilettage pour chat) plus de 100 yuans, avec un petit cadeau en bonus, sous la forme d'un peigne pour le propriétaire du chat ! Ensuite, il y a un toboggan intérieur pour 300 yuans, toutes sortes de lits, et bien d'autres choses encore.

Pourtant, tout cela n'est que la partie visible de l'iceberg de l'économie féline. Les soins médicaux, les parcs à thème et les services de pension pour animaux de compagnie élargissent aussi le secteur. Les vacances de la Fête du Printemps, en février, ont été une période de pointe pour des services de ce type, car de plus en plus de propriétaires d'animaux de compagnie ont eu tendance à recourir aux hôtels de luxe pour animaux de compagnie car les chenils d'accueil ordinaires étaient surbookés.

Liu Ronghuan, 35 ans, professeur d'université à Beijing, s'est dite très satisfaite de l'hôtel pour animaux de compagnie qu'elle a choisi pour son chat. Il offrait des services de luxe comme des massages, des salons de beauté et des photos de portraits d'animaux. Le séjour de sept jours lui a coûté environ 5 000 yuans, presque le même prix qu'une chambre d'hôtel trois étoiles.

« Au-delà du prix, je me suis davantage souciée de savoir si mon chat passait un moment agréable pendant la réunion de famille", a-t-elle dit.

(Rédacteurs :Gao Ke, Yishuang Liu)
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