Dernière mise à jour à 08h39 le 03/05
Alitalia a annoncé mardi que son conseil d'administration avait décidé de demander formellement au gouvernement que le transporteur soit soumis à une administration spéciale après que les employés aient rejeté son dernier plan de sauvetage destiné à débloquer les financements dont la compagnie a tant besoin. La majorité des salariés d'Alitalia ont voté la semaine dernière contre un plan de restructuration qui prévoyait des réductions d'emplois et de salaires, rendant impossible pour la compagnie aérienne nationale italienne en fort déficit de sécuriser les fonds nécessaires pour que ses avions volent. Alitalia a néanmoins ajouté que son calendrier de vol resterait inchangé.
Une fois qu'Alitalia sera placée sous administration spéciale, le gouvernement de Rome nommera un ou plusieurs commissaires qui évalueront si elle peut être refondue -soit en tant que société autonome, soit par vente partielle ou totale- ou si elle doit purement et simplement être liquidée. De leur côté, les Italiens regardent leur compagnie porte-drapeau Alitalia entrer dans une autre tourmente financière et un nombre croissant d'entre eux croient que ce serait mieux pour le pays qu'elle disparaisse. Indignés et lassés par les renflouements d'État répétés qui ont coûté aux contribuables plus de 7 milliards d'Euros en dix ans, de nombreux Italiens déferlent sur les médias sociaux pour exhorter le gouvernement à résister à la tentation politique de se précipiter à nouveau à son secours.
« En termes électoraux, Alitalia ne vaut rien. C'est un poids mort », a déclaré l'un d'entre eux, Angelino Ghinelli, dans une véritable tempête de médias sociaux qui n'est pas passée inaperçue à Rome, où les ministres ont jusqu'ici montré une forte réticence à offrir de nouvelles garanties. « Sauver Alitalia, ça suffit », a écrit Cinzia Briguglio, l'une des quelque 1 000 signataires d'une pétition en ligne qui a débuté cette semaine, demandant au gouvernement de ne pas s'impliquer. Des groupes de consommateurs se sont également lancés dans la bataille, dont un, Codacons, qui a menacé de demander à la Cour des comptes italienne, un auditeur judiciaire, d'examiner tout plan de sauvetage de l'État. Ce tribunal peut sanctionner des responsables, y compris des ministres, pour avoir gaspillé des fonds publics. Un sondage d'opinion publié vendredi quatre jours après que les employés d'Alitalia aient voté pour rejeter un plan de sauvetage soutenu par le syndicat proposé par la direction, montre d'ailleurs que 77% des Italiens estiment que la compagnie aérienne devrait être laissée aller à la faillite.
« Il est clair que les Italiens s'opposent à ce que les gouvernements réduisent systématiquement les déficits pour gérer le problème des entreprises en crise », a déclaré Natascia Turato, directeur d'Index Research, dans un commentaire publié en ligne par ce cabinet, ainsi que les résultats de son sondage. Sans le soutien de l'État, il est probable qu'Alitalia s'effondrera. Les compagnies aériennes rivales montrent quant à elles peu d'intérêt à l'acheter, et les créanciers refusent de prêter plus d'argent après que les employés aient voté la semaine dernière contre un plan de sauvetage qui aurait supprimé 1 700 emplois et réduit les salaires. Le gouvernement a également exclu de re-nationaliser l'ancienne entreprise publique, autrefois symbole du boom économique de l'après-guerre en Italie, mais aujourd'hui en train de lutter contre la concurrence des transporteurs low cost Ryanair et EasyJet. Le Ministre italien des finances, Pier Carlo Padoan, est même allé un peu plus loin, affirmant que le gouvernement ne voulait pas, directement ou indirectement, investir du capital. Mais avec une élection générale prévue pour mai 2018, peu d'Italiens croient que le Parti démocratique au pouvoir ne fera rien et se contentera de regarder Alitalia couler et ses 12 500 salariés perdre leur emploi.