Dernière mise à jour à 13h44 le 01/09
Des flots de fumée, depuis le site d'une gigantesque explosion à Tianjin, le 13 août 2015. [Photo/CFP] |
Certains résidents ont indiqué ne pas vouloir rentrer chez eux, depuis qu'ils savent que des produits toxiques ont été stockés à proximité.
Liu Xuerui pensait commencer une nouvelle vie, en devenant propriétaire d'un appartement près du port de Tianjin en 2013. Mais, il a fallu attendre mercredi soir, pour réaliser qu'il vivait à proximité d'un entrepôt de produits chimiques toxiques.
Cela lui a coûté cher. Les explosions équivalant à 21 tonnes de TNT, ont brisé ses fenêtres et arraché les portes de son appartement.
L'homme n'a pas été blessé, mais il est encore sous le choc.
Certaines personnes, dont les logements ont été endommagés, ne veulent plus vivre dans cette zone.
«Nous pensions qu'il y avait seulement des piles de conteneurs et des parcs de stationnement pour les voitures importées. Personne ne nous a dit qu'il y avait des produits chimiques, où sinon je n'aurais jamais choisi de vivre ici», a expliqué Liu, âgé de 27 ans.
Le quartier résidentiel de Liu, Vanke Haigangcheng, a été inauguré en décembre 2013. Toutefois, un avis public publié le 10 septembre 2014, sur le site Internet de la nouvelle Zone de Binhai, indiquait que la société avait changé l'utilisation de ses entrepôts pour le stockage temporaire de produits chimiques dangereux, lors des procédures d'import-export (les bâtiments rénovés ont été mis en service en avril 2014).
Parmi, les questions soulevées par les résidents suite à cette tragédie, qui a jusqu'ici fait au moins 112 morts. Une question revient sans cesse : Comment la société, Ruihai International Logistics Internationale Co Ltd, a-t-elle été en mesure de stocker une si grande quantité de produits chimiques dangereux dans ses entrepôts et à l'extérieur.
Le Southern Metropolis Daily a rapporté que l'entreprise gardait 700 tonnes de cyanure de sodium hautement toxique à l'extérieur de ses bâtiments, lorsque l'explosion a eu lieu.
Mélange de produits chimiques
Le rapport a indiqué que la compagnie disposait d'un certificat pour stocker environ 10 tonnes de cyanure de sodium.
Le site Web de la compagnie propose des services d'entreposage pour les six catégories de produits chimiques dangereux, y compris les oxydants forts tels que le nitrate de potassium, et inflammables, comme le carbure de calcium et de soufre, et le cyanure de sodium.
De l'avis des experts en génie chimique, le mélange de produits chimiques dans les entrepôts demande une manipulation professionnelle.
«Vous ne pouvez pas placer les six catégories de produits chimiques dans un même lieu, car certains peuvent exploser s'ils se mélangent», a souligné Dong Wengeng, professeur de l'ingénierie de la sécurité à la Hebei University of Science and Technology.
«Une intervention également très complexe pour les pompiers. Dans le cas d'un incendie, certains produits chimiques exigent l'utilisation de l'eau pour éteindre le feu, notamment le nitrate de potassium», a-t-il noté.
«Mais d'autres produits comme le carbure de calcium, peuvent exploser en cas de contact avec l'eau. Dans ce cas, l'utilisation d'une poudre sèche s'impose, excepté pour le carbure de calcium qui peut exploser à tout moment», a-t-il ajouté.
Gao Huaiyou, chef adjoint du Bureau de sécurité public de Tianjin, a déclaré samedi lors d'un point presse, que les autorités étaient en mesure de confirmer que les produits chimiques avaient été stockés dans deux endroits à l'intérieur des locaux de l'entreprise : dans la zone des conteneurs et dans celle du transport.
L'incapacité à déterminer la présence des volumes et catégories, a retardé jeudi les interventions, alors que le centre de secours a voulu dans un premier temps examiner en détails la scène du drame.
Dans l'un des possibles premiers verdicts de l'accident, le Comité de sécurité du Conseil d'Etat a indiqué dans un avis d'urgence vendredi : la non-application des lois en matière de sécurité et de réglementation, des lacunes dans l'exportation et l'importation de marchandises dangereuses, et des interventions d'urgence inappropriées en cas d'accident. Déclarant que le pays devrait interdire la manipulation de produits chimiques dangereux et produits explosifs, sans un maxium de sécurité.
La nation doit pour cela améliorer sa capacité à faire face à de telles tragédies, optimiser ses plans d'intervention d'urgence et de renforcer les exercices d'urgence parmi les résidents.
Trop de questions
En Chine, environ 77% des accidents impliquant des produits chimiques dangereux, ont lieu alors qu'ils sont déplacés ou transportés, et un autre 9% ont lieu dans les entrepôts, d'après les dernières statistiques de l'Administration d'Etat de la sécurité au travail.
Chai Baoshen, secrétaire général de la branche des produits chimiques dangereux-de l'Association chinoise de l'entreposage et de stockage, dans un entretien accordé à China Chemical Industry News en 2012, avait fait savoir que la production de produits chimiques avait augmenté régulièrement au cours des dernières années, mais que les exportations avaient fortement chuté, entraînant des stocks.
Chai a refusé toute demande d'interview vendredi.
Pour le propriétaire Liu Xuerui : «Nous avons trop de questions à poser. Nous sommes également les victimes, et aujourd'hui nous ne savons pas quoi faire».
Liu a fait remarquer que personne n'avait fait attention à eux au cours de la nuit des explosions, les autorités étant concentrées sur les missions de recherche et de sauvetage.
Zhang Lu, qui vivait près du site de l'explosion, a confié être chanceux, car il n'a pas été blessé. «Nous méritons d'avoir une explication sur les raisons de la construction d'un entrepôt si près de chez nous, et à notre insu. Et peu importe la suite des événements, je ne vais pas revenir. Je veux seulement laisser ce cauchemar loin derrière nous».