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Entre Macron et Trump, une rencontre sur fond de dissonances diplomatiques

Xinhua | 23.04.2018 09h08

Le président français s'apprête à se rendre outre-Atlantique pour répondre à l'invitation de son homologue américain Donald Trump qui recevra aussi dans la foulée la chancelière allemande, puis possiblement le président russe. Sur fond d'une situation internationale compliquée, la marge de manœuvre diplomatique d'Emmanuel Macron, qui promeut le retour la France sur la scène internationale, est plutôt mince. D'autant que les deux chefs d'Etat doivent relever de délicats défis de politique intérieure.

Dans ses interventions à la presse, le président français aime à user du terme "ami" quand il évoque Donald Trump. A la veille de son voyage d'Etat aux Etats-Unis, du 23 au 25 avril, Macron aura pourtant fort à faire pour convaincre son homologue américain, portant une image d'"imprévisible", à infléchir sa position sur des dossiers délicats.

Au-delà des sujets de convergence entre Paris et Washington que sont le Mali et la lutte antiterroriste, le soutien au G5 Sahel, les désaccords restent en effet nombreux entre les deux hommes, tous deux arrivés au pouvoir en 2017.

La visite en France, le 14 juillet dernier, du locataire de la Maison-Blanche, séduit par le défilé de la fête nationale, a contribué à adoucir l'atmosphère entre Paris et Washington mais la relation franco-américaine, qu'Emmanuel Macron s'efforce de personnaliser avec pragmatisme et un certain talent, demeure structurellement déséquilibrée.

Le président français comptait bénéficier d'une configuration tout-à-fait inédite sur la scène européenne et profiter du vide laissé par les alliés historiques des Etats-Unis sur le Vieux continent que sont le Royaume-Uni, empêtré dans le Brexit, et l'Allemagne, affaiblie après six mois d'incertitude politique.

Derrière les échanges d'aménités entre Donald Trump et Emmanuel Macron persiste toute une série de désaccords sur les sujets internationaux et économiques. A commencer par la question de l'accord sur le nucléaire iranien que Donald Trump menace de dénoncer.

L'Accord de Paris sur le climat jugé "mauvais" par le leader américain, ses menaces à peine voilées de guerre économique, le transfert de l'ambassade étasunienne à Jérusalem sont par ailleurs des dossiers autant épineux que cruciaux.

Sur le front commercial, Emmanuel Macron a monté d'un ton fin mars contre son homologue américain suite à la décision de Washington d'imposer des taxes sur les importations d'acier et d'aluminium. "On parle de tout par principe avec un pays ami qui respecte les règles de l'OMC. On ne parle de rien par principe lorsque c'est avec un fusil sur la tempe", avait-t-il alors déclaré.

Donald Trump a donné fin mars à l'Union européenne (UE) et six pays jusqu'au 1er mai pour négocier des exemptions permanentes aux tarifs de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium qu'il a décidé d'instaurer pour mettre un terme aux "agressions" commerciales dont Washington s'estime victime.

A l'horizon des élections mi mandat novembre 2018 aux Etats-Unis, il y a fort à parier que le leader américain ne mette pas d'eau dans le vin, fût-il français, de ses convictions anti-environnementales, protectionnistes, anti-Iran, et pro-Israël.

"Le pari de l'entente fait par l'Elysée semble devenu plus hasardeux, d'autant que le durcissement de l'équipe de politique étrangère américaine doit sans doute être appréhendé sur le long terme. Compte tenu de la faiblesse du Parti démocrate, de l'inexistence d'une opposition à Trump au sein du Parti républicain, la réélection du trublion de la Maison-Blanche en 2020 reste une hypothèse ouverte", commente, maître de conférence à Sciences-Po Paris Laurence Nardon, dans une étude collective de l'IFRI (Institut français des relations internationales ), intitulée "Macron, an I. Quelle politique étrangère ?" parue en début de semaine.

La décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme la capitale d'Israël, qui a mis le feu aux poudres dans la région début décembre, et dont on peut raisonnablement craindre de délétères effets domino, a été critiquée par Emmanuel Macron. En décembre, au coté du président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à Paris, il avait estimé que les Etats-Unis s'étaient ainsi "marginalisés".

De nombreux experts s'interrogent par ailleurs sur la stratégie globale suivie par Emmanuel Macron dans le cadre de l'Organisation du Traité de l'Alliance atlantique (OTAN) dont Donald Trump avait également menacé de se retirer.

Si la France est toujours considérée outre-Atlantique comme un partenaire diplomatique et militaire qui compte, elle n'a plus l'étoffe d'un partenaire économique solide malgré l'amélioration récente de la conjoncture, estiment des analystes. Macron doit s'attendre à un véritable parcours d'obstacles s'il ne veut pas être réduit à jouer aux petits chevaux face à un Donald Trump, maître dans l'art du poker.

Par Claudine Girod-Boos et Han Bing

(Rédacteurs :Guangqi CUI, Wei SHAN)
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