Dernière mise à jour à 10h39 le 22/11
Plus de deux décennies après que le leader d'Haïti ait dissous son armée, avec son histoire de coups d’État violents, la petite nation des Caraïbes est sur le point de dévoiler une armée reconstituée. L'armée nationale haïtienne a été officiellement réintroduite avec un défilé le 18 novembre, anniversaire de la bataille décisive de Vertières en 1803, qui assura l'indépendance d’Haïti de la France. Le Président Jovenel Moïse a pour ambition de la distinguer de l'armée qui renversa Jean-Bertrand Aristide en 1991. Quand M. Aristide reprit la présidence en 1995, il démantela l'armée et confia la sécurité à la police nationale civile haïtienne. Cette force compte maintenant environ 15 000 agents.
« L'armée que je réinstalle pour vous est une armée professionnelle. C'est une nécessité pour notre pays. Ce ne sera pas une armée de répression », a déclaré le Président Moïse, qui a pris ses fonctions en février, lors d'une conférence de presse la semaine dernière. « Ce sera plutôt une armée qui apportera son aide quand un ouragan frappe notre pays. Elle aidera à réparer les routes. C'est l'armée que je vous ai promise ». Selon le Ministre de la défense, Hervé Denis, qui s'est exprimé lors d'une conférence de presse, l'armée compte au moins 150 recrues, des hommes et des femmes jeunes, principalement engagés dans la construction des infrastructures du pays appauvri. Depuis leur sélection à la fin de l'été, ils ont créé une clinique médicale dans le centre d'Haïti et ont commencé à réparer les routes.
Finalement, la nouvelle armée pourrait compter de 3 000 à 5 000 soldats, a précisé M. Denis. Le gouvernement haïtien a alloué 8,5 millions de Dollars pour les dépenses de défense au cours de l'exercice 2018. Le ministre a reconnu des problèmes de financement mais, selon le Miami Herald, les patrouilles des forces armées pourraient endiguer les pertes annuelles dues à la contrefaçon, évaluées de 200 à 500 millions de Dollars, provenant de la République dominicaine voisine. « Mais nous savons que nous ne pouvons pas avoir une armée de cette taille du jour au lendemain » en raison des contraintes budgétaires, a-t-il ajouté.
La restauration de l'armée haïtienne suscite des réactions mitigées au pays et à l'étranger. L'armée offre de précieux emplois dans un pays pauvre dont le taux de chômage dépasse 40%, mais, depuis l'annonce, il y a eu de manifestations de rue à Cap-Haïtien, la deuxième plus grande ville du pays, avec des centaines d'étudiants du secondaire protestant contre les dépenses pour une nouvelle armée lorsque leurs enseignants ne touchent plus leur salaire depuis des mois. Leur cri de ralliement : « Nous ne voulons pas d'armée, nous voulons une éducation ! ». « Le pays a d'autres priorités qui sont plus importantes que l'armée », a déclaré Édouard Innocent, l'ancien maire de la ville, lors d'une interview téléphonique. Il a déclaré que le Président Moïse devrait « donner la priorité au développement économique, à l'éducation et à la santé. ... Je pense que cette armée est un moyen pour le président d'assurer son pouvoir ».