Dernière mise à jour à 08h39 le 27/03
La bande de Gaza, contrôlée par le parti Hamas, est connue depuis longtemps pour sa communauté masculine, pourtant une institutrice de 27 ans, Heba Fayez, a décidé d'ouvrir un café réservé aux femmes afin de permettre aux femmes de passer un moment agréable tout en préservant leur tranquillité.
Les hommes ne sont pas autorisés dans ce café, dont la plupart des clients sont des femmes au foyer, et où les serveuses, également des jeunes femmes, servent des boissons non alcoolisées froides et chaudes.
Avant de devenir un café réservé aux femmes, ce local était utilisé par une salle de billard pour hommes, qui a fermé il y a plusieurs semaines.
"L'idée d'avoir un café spécial réservé aux femmes dans une société conservatrice comme celle de Gaza m'est venue il y a plusieurs mois, et lorsque deux de mes amies proches, Doaa et Yasmin, ont partagé ce rêve avec moi, nous avons trouvé le courage d'ouvrir le premier café réservé aux femmes à Gaza il y a quelques semaines", raconte Mme Fayez à Gaza.
La population masculine représente 51% des 2 millions d'habitants dans la bande de Gaza, contre 49% pour la population féminine.
La ville de Gaza compte également des cafés mixtes pour les classes populaires et moyennes.
Toutefois, un certain nombre de maris et de parents conservateurs refusent que leurs proches de sexe féminin fréquentent ces endroits.
"Je pense que c'est une très bonne idée qui a aidé beaucoup de femmes à Gaza qui ne peuvent pas se sentir bien dans un café mixte, et préfèrent venir ici pour rencontrer leurs amis, discuter et savourer des boissons froides ou chaudes", explique Mme Fayez, ajoutant, "la chicha ou le narguilé ne sont pas autorisés, mais nous avons une table de billard pour que les femmes puissent passer un moment agréable".
Depuis la prise de pouvoir par la force du mouvement islamique Hamas dans la bande de Gaza en été 2007, après plusieurs semaines de conflits internes avec les forces de sécurité du président palestinien Mahmoud Abbas, le mouvement a imposé un code de conduite islamique strict à la population, et en particulier aux femmes.
Les groupes de défense des droits civiques à Gaza ont déjà signalé dans plusieurs rapports sur les droits civiques publiés ces dernières années que le régime du Hamas à Gaza imposait le port du Hijab (foulard sur la tête) aux écolières et étudiantes et aux avocates, interdisaient aux femmes de fumer le narguilé seules dans des cafés publiques, ou de recevoir des leçons de conduite d'automobiles sans être accompagnées par un membre de leur famille proche.
Les prix de ce café pour femmes, nommé al-Jalla, sont très raisonnables et proportionnés aux faibles revenus des clientes, a déclaré à Xinhua, Samar al-Rayyes, une femme de 45 ans et cliente régulière de l'établissement, ajoutant "une tasse de café ou de thé coûte 3 shekels israéliens soit moins d'un dollar".
M. Al-Rayyes raconte que son mari ne l'autorise pas à se rendre dans des cafés mixtes car il est conservateur, et d'ajouter qu'elle est très heureuse maintenant de pouvoir au moins sortir s'amuser avec ses amies en discutant de différents sujets concernant la situation dans la bande de Gaza, une région souffrant actuellement de niveaux de pauvreté et de chômage élevés.
Au début, Mme Al-Rayyes a été très surprise quand elle a entendu parler de ce café réservé aux femmes, et elle se souvient qu'elle "en a parlé à son mari et il a bien aimé cette idée, malheureusement il ne peut pas venir avec moi car c'est un lieu réservé aux femmes et il n'aime pas aller dans les cafés mixtes".
Beaucoup de femmes divorcées et au chômage fréquentent aussi ce café et y discutent fréquemment de la manière dont elles peuvent vivre sans leur ex-mari, saluant ce café réservé aux femmes comme un moyen de sortir de chez elles pour s'amuser.
"Ce café réservé aux femmes est destiné aux nombreuses femmes de Gaza qui ne peuvent trouver de vie privée nulle part, pour qu'elles puissent venir ici, rencontrer leurs amies, et discuter de ce qu'elles veulent", explique Mme Fayez, propriétaire du café.
Mme Fayez déplore que beaucoup de personnes actives sur les médias sociaux aient commencé par critiquer ou dénoncer l'idée en elle-même lorsqu'elle a ouvert ce café, certains estimant que "ces femmes enfreignent la tradition originale de la communauté de Gaza", tandis que d'autres jugeraient que les femmes qui se rendaient dans ce café "perdaient du temps et négligeaient leurs enfants et leur mari".
Um Osama, une mère de cinq enfants âgée de 44 ans, a déclaré à Xinhua qu'elle avait appris l'existence de ce nouveau café réservé aux femmes sur Facebook, et d'ajouter: "quand j'ai lu les critiques contre l'ouverture d'un café réservé aux femmes, j'ai pensé que c'était une idée formidable de permettre aux femmes enfermées chez elles en permanence de sortir pour trouver un endroit où elles pourraient passer un moment agréable".
En plus d'être contrôlé par le Hamas, d'être maintenu sous blocus par Israël, et d'avoir essuyé trois offensives militaires à grande échelle de l'État hébreu, la bande de Gaza est fondamentalement une société conservatrice, différente de celle de la Cisjordanie ou de la communauté arabe en Israël.
"J'ai décidé d'aller dans ce café pour y apprécier la tranquillité, car les femmes ne sont pas à l'aise dans les restaurants ou les cafés à la clientèle mixte. Si une femme rit ou parle fort, tout le monde autour la remarque", raconte Um Osama, qui n'a pas souhaité décliner son nom complet.
"Nous avons pensé à ouvrir ce café réservé aux femmes pour permettre aux femmes d'être totalement elles-mêmes sans craindre ce qu'elles connaissent dans les cafés mixtes", ont expliqué Mme Fayez et ses deux amies.