Le nom du prochain président de la Commission européenne (CE) reste en suspens suite au sommet informel du Conseil européen de cette semaine.
Il est apparu mercredi que certains chefs d'État et de gouvernement européens n'étaient pas vraiment enthousiastes par les candidats proposés par les partis politiques du Parlement européen (PE), et dont le candidat principal reste l'ancien Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker.
M. Juncker est choisi par le Parti populaire européen (PPE), qui a obtenu le plus grand nombre de sièges ( 213 ) dans le nouveau PE, et a été largement présenté comme le favori pour remplacer le président sortant José Manuel Barroso. Cependant, le Premier ministre britannique David Cameron reste opposé à la candidature de M. Juncker, de même que quelques autres chefs d'Etat.
Suite à la réunion du Conseil européen, la chancelière allemande Angela Merkel a nuancé son soutien à M. Juncker, en ajoutant qu'une proposition de candidats par le Conseil restait possible. Elle s'est montrée ferme en disant que le poste le plus important dans la CE ne devait pas être décidé à la hâte, tout juste deux jours après les élections européennes. Mme Merkel a surtout maintenu qu'à un moment aussi critique dans l'histoire de l'Union européenne (UE), il était d'autant plus important de suivre l'esprit du traité de Lisbonne.
Ce traité stipule que le Conseil européen propose un candidat "en tenant compte des résultats des élections européennes". Toutefois, il n'est pas obligé de choisir un candidat de groupes politiques du PE. Ce dernier pourra, par exemple, proposer son propre choix. Les alternatives possibles diffusées dans les médias incluent Christine Lagarde, actuellement présidente du Fonds monétaire international (FMI), le Premier ministre irlandais Enda Kenny (même s'il a publiquement soutenu M. Juncker), le Premier ministre finlandais Jyrki Katainen, et Mme Helle Thorning-Schmidt, la Première ministre danoise.
La position de la chancelière allemande semble être plus proche de celle du leader britannique M. Cameron, qui a subi une pression intense sur le plan national suite au résultat historique du parti eurosceptique UKIP (Parti de l'Indépendance du Royaume-Uni) , qui a remporté le plus grand scrutin (26,77%) dans le vote britannique.
Ce n'est un secret pour personne que M. Cameron voit M. Juncker ainsi que le candidat socialiste, l'Allemand Martin Schulz, comme des supporters d'une Europe plus fédérale. A son arrivée à Bruxelles, M. Cameron a déclaré que les dirigeants des institutions de l'UE devaient "vraiment comprendre" qu'ils devaient céder le pouvoir aux capitales nationales, afin de "construire une Europe plus ouverte, compétitive et flexible".
Cette bataille au sein du Conseil européen fait suite aux résultats marquant les élections européennes de ce week-end, où les partis eurosceptiques d'extrême droite et d'extrême gauche ont beaucoup progressé dans un certain nombre de pays de l'UE.
Cela a conduit à des appels pour une révision radicale des relations entre les institutions européennes et les Etats.
Ces demandes émanent plus particulièrement de la part de leaders des pays les plus touchés par ce scrutin, à savoir M. Cameron et le président français François Hollande.
De ce point de vue, M. Juncker représente la continuité; c'est-à-dire, un progrès constant vers une plus grande intégration européenne qui fait peur évidemment à une minorité significative de citoyens de l'UE qui ont voté la semaine dernière.
D'un autre côté, les députes du PE peuvent souligner le fait que 70% de ceux qui sont allés aux urnes ont voté pour les partis qui sont pro-européens. Ce chiffre s'élève à plus de 80% en prenant en compte d'autres petits partis à tendance pro-UE.
Avant les commentaires de la chancelière Merkel à la presse, la Conférence des Présidents du PE, qui regroupe les chefs des différents partis politiques au Parlement, a envoyé une lettre au Conseil européen lui demandant de donner à M. Juncker "un mandat clair" pour entamer des négociations avec des groupes politiques du PE.
Hannes Swoboda, président du groupe Socialiste, a déclaré : "Ce n'est pas le moment pour le Conseil européen d'être nombriliste, mais il est temps de donner aux forces pro-européennes une chance de répondre aux préoccupations des électeurs grâce à un programme détaillé pour les cinq prochaines années. Le PPE reste le plus grand groupe au Parlement. Son candidat pour la présidence a donc clairement le droit de commencer des négociations pour trouver une majorité."
Cependant, les chefs d'État ont une autre interprétation de ce "droit clair". Ils ont mandaté le président du Conseil, Herman van Rompuy, d'ouvrir des négociations avec le nouveau Parlement pour trouver un candidat qui peut obtenir une majorité de députés, mais il est clair que M. van Rompuy a quelques semaines difficiles devant lui.