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Chine : la construction d'"une société modérément prospère" inspire le monde

Xinhua | 07.10.2017 15h54

Long Tianbao, agriculteur de 44 ans au Guizhou, l'une des provinces les plus pauvres de la Chine, ne pouvait pas imaginer que trois kilos de riz allaient changer la vie de sa famille.

Son village natal étant situé dans un coin reculé de la montagne inhospitalière de Lune, Long Tianbao, membre de l'ethnie Miao du village de Baiwang, dans le district de Rongjiang, n'avait aucune idée de ce qui allait se passer quand le gouvernement a déplacé l'ensemble de la population du village jusqu'au siège du district, à 25 km de là.

"Sans éducation, et avec mes seuls bras, comment trouver un travail? Comment gagner ma vie dans un bourg où tout coûte si cher?" s'est-t-il demandé.

Après de nombreuses discussions, M. Long et sa femme ont décidé d'emporter avec eux trois kilos de riz.

"Si nous trouvons du travail avant d'avoir fini le riz, nous restons. Sinon, nous rentrons chez nous, dans la montagne, et n'en partirons plus jamais", se souvient M. Long.

Ils ont tous les deux trouvé un emploi dans une usine de briques dès le lendemain.

Aujourd'hui, ils ont un appartement à seulement 3 km de leur entreprise, gagnent plus de 6.000 yuans (900 dollars) par mois, quasiment l'équivalent de leur revenu annuel d'autrefois.

Leurs deux enfants ont fait des études pour devenir professeur et docteur.

M. Long, qui n'était jamais monté sur un vélo, a appris à utiliser un chariot élévateur, à conduire une moto, et a obtenu son brevet de soudeur à l'électricité.

La Chine devrait atteindre en 2020 son objectif de bâtir "une société modérément prospère" sous tous ses aspects, avec des niveaux de PIB et de revenu par personne du double de ceux de 2010.

La tâche principale est de faire sortir l'ensemble de la population de la pauvreté.

Cela implique l'amélioration du niveau de vie de 43,35 millions de Chinois vivant encore sous le seuil national de pauvreté fixé à 2.300 yuans par an, sur la base des prix de 2010.

Si cela se fait dans les temps, la Chine aura atteint l'objectif fixé par l'ONU d'éliminer la pauvreté sous toutes ses formes, dix ans avant la date butoir de 2030.

La Chine comptait 770 millions de résidents pauvres dans les zones rurales, soit 97,5% de la population rurale, au début de sa réforme et sa politique d'ouverture il y a plus de 30 ans. Plus de 700 millions sont, depuis, sortis de la pauvreté, soit plus de 70% de l'objectif de réduction générale de la pauvreté.

Face à ces chiffres, le magazine "The Economist" a qualifié la Chine de "championne du monde de la réduction de la pauvreté". Le monde compte encore environ 700 millions de pauvres, dont la moitié en Afrique sub-Saharienne, et un tiers en Asie du sud. De plus en plus de pays regardent vers la Chine pour s'inspirer de ses méthodes.

LE NOUVEL EFFORT

Au cours des dernières décennies, la Chine a construit des autoroutes, des chemins de fer, des ports, des réseaux d'électricité et d'eau potable, ainsi que toutes les infrastructures possible afin de relier chaque point du pays, permettant ainsi à un nombre très important de ses citoyens de sortir de la pauvreté.

Pour des endroits comme le village de Baiwang, isolé dans les montagnes, sur une terre aride, avec un environnement fragile et de fréquentes catastrophes naturelles, les méthodes traditionnelles de réduction de la pauvreté ont échoué.

Le relogement a prouvé son efficacité, garantissant à chaque ménage un appartement de 50m², l'accès à une formation adaptée, et un emploi à au moins un membre de la famille. Le niveau de la pauvreté à Baiwang est passé de 68,9% à 4,8%.

Pour accélérer l'élimination de la pauvreté extrême, le Guizhou a ciblé 7.654 villages qui seront déplacés d'ici 2020, chacun représentant une cinquantaine de foyers et un niveau de pauvreté dépassant 50%.

Hannah Ryder, ancienne chef chargée de la politique et du partenariat pour le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en Chine, a averti du coût considérable de l'opération, alors que la Chine entre dans la phase la plus difficile de la lutte contre la pauvreté.

"La réduction de la pauvreté, comme beaucoup de causes importantes, est soumise à la loi des rendements décroissants", a-t-elle précisé.

"Les premiers bénéficiaires sont ceux qui étaient les mieux à même de parvenir à sortir de la pauvreté, en raison de leurs situations personnelles ou de leurs situations géographiques. Alors même qu'il ne resterait qu'une poignée - voire quelques millions - de personnes sur le bord du chemin, on peut penser qu'il sera bien difficile de les atteindre", estime Mme Ryder.

Pour répondre à cette problématique, la Chine s'appuie sur la réforme et diversifie ses tactiques en matière de réduction de la pauvreté. La direction du pays met l'accent sur la précision extrême de sa dernière offensive contre la pauvreté. Elle doit se focaliser sur les individus et utiliser des outils pertinents pour assurer la répartition des ressources destinées aux plus pauvres, et de la manière la plus efficace possible.

La Chine avait l'habitude de procéder à des enquêtes par échantillonnage pour définir quels villages ou quels bourgs pouvaient être considérés légitimement comme démunis, et concentrait alors ses efforts en fonction des résultats des enquêtes.

Lorsque la pauvreté était très répandue et que l'écart entre les revenus était moins important, cette approche uniforme a fait des miracles.

En 2014, pourtant, le gouvernement a mobilisé plus de 800.000 personnes pour monter les dossiers individuels des personnes démunies, tout en identifiant les causes de leur pauvreté et leurs besoins pour en sortir.

Entre août 2015 et juin 2016, il a été fait appel à environ deux millions de personnes pour s'assurer que les Chinois qui sont vraiment aux prises avec la pauvreté figuraient bien tous dans cette banque de données, selon le Bureau du groupe dirigeant pour la réduction de la pauvreté et le développement du Conseil des Affaires d'Etat.

En plus d'un calendrier sur plusieurs années pour éradiquer la pauvreté à la racine, le gouvernement chinois a aussi élaboré différentes politiques pour différentes régions en fonction de leurs situations propres, concernant notamment le développement commercial, la réinstallation, l'indemnisation des agriculteurs dans les zones écologiquement fragiles, le renforcement de l'éducation et l'amélioration de la sécurité sociale. (à suivre)

LA "PLANCHE COURTE" DE LA CHINE

Récemment, la Chine a sanctionné en juillet dernier 23 fonctionnaires locaux, dont le vice-gouverneur de la province du Gansu, qui ont failli à leur mission de prévention des infractions environnementales commises dans la réserve naturelle nationale de la Montagne de Qilian, et qui n'ont pas ouvert d'enquête.

Davantage de fonctionnaires chinois feront l'objet d'un audit de leur travail en matière de conséquences environnementales, stipule une nouvelle réforme adoptée le 26 juin, selon laquelle tout impact négatif sur l'environnement suivra professionnellement chaque fonctionnaire, même après son départ de ses fonctions publiques, et affectera ses futures promotions.

Cela fait partie des efforts des autorités chinoises pour évoluer vers un modèle de développement vert en corrigeant les pratiques qui stimulaient la croissance économique au détriment de l'environnement, un des points faibles majeurs du pays.

La théorie du "wooden bucket (seau en bois)", selon laquelle la quantité d'eau qu'un seau en bois peut contenir dépend de la hauteur de sa planche la plus courte, a sous-tendu les pratiques de gouvernance de la Chine sur sa voie vers une société modérément prospère, a indiqué Xu Yaotong, professeur de l'Ecole nationale d'administration de Chine.

Pour bâtir une société modérément prospère à tous points de vue, le pays doit s'attaquer à ses "planches courtes et fragiles", a proposé M. Xu.

"Réaliser une société modérément prospère sous tous ses aspects n'est pas un jeu de chiffres ou de vitesse", a déclaré le président chinois Xi Jinping à la fin de l'année dernière.

Lors d'un atelier qui a eu un grand retentissement fin juillet, M. Xi a identifié trois batailles qui devaient être gagnées afin de s'assurer que l'objectif sera atteint comme prévu, à savoir la prévention et le désamorçage des risques majeurs, la rigueur dans l'élimination de la pauvreté, ainsi que la prévention et le contrôle de la pollution.

"En maintenant une croissance économique modérée à rapide, le Parti communiste chinois (PCC) est engagé également dans l'amélioration de la qualité de vie de la population, avec notamment moins de journées de pollution, des rivières plus propres, une offre plus importante de logements sociaux et un meilleur système de sécurité sociale", a expliqué Xin Ming, professeur de l'Ecole du Parti du Comité central du PCC.

"Une société modérément prospère dans le pays le plus peuplé du monde doit être une bonne nouvelle pour la Chine en particulier et le monde en général", a-t-il ajouté.

Bien que l'économie chinoise n'augmente plus à une vitesse aussi vertigineuse qu'avant, ses efforts systématiques en matière de restructuration et de prévention des menaces potentielles fait du pays un moteur puissant de la croissance mondiale.

"Le développement rapide de la Chine a coûté très cher à l'environnement, ce que l'Occident comprend très bien", a constaté l'administratrice de la PNUD Helen Clark."Mais nous voyons également que la Chine progresse véritablement en leader sur le dossier du changement climatique, ce qui est réellement essentiel, parce que ce que la Chine fait a une portée mondiale, compte tenu de la dimension de son économie et de sa population", a-t-elle fait remarquer. (à suivre)

LE MODELE CHINOIS

En avril, Mark van den Boogaard, haut conseiller politique de la PNUD, et Javier Miranda, président du Front large (Uruguay), se sont rendus dans des zones montagneuses de la province chinoise du Yunnan (sud-ouest) pour avoir un aperçu de la méthode chinoise de réduction ciblée de la pauvreté.

Mark van den Boogaard a été impressionné par l'orientation globale du PCC et par les efforts conjoints de la société sur le sujet."D'après ce que nous avons vu dans le nord du Yunnan, sous la direction du PCC, les autorités chinoises sont clairement sur la bonne voie", a-t-il indiqué.

De nombreux experts sont convaincus que les capacités de la Chine à coordonner les efforts à l'échelle nationale pour combattre la pauvreté s'appuient sur son système socialiste aux caractéristiques chinoises, et que ce système est l'avantage institutionnel du pays.

La Chine a débloqué 282,2 milliards de yuans pour la réduction de la pauvreté pris dans son budget central, et a aménagé 270 milliards de yuans de dettes des gouvernements locaux entre 2013 et 2017.

En même temps, plus de 195.000 premiers secrétaires du PCC ont été affectés dans les villages sous développés, tandis que 775.000 cadres du Parti ont été envoyés pour les aider.

Les réalisations majeures de la Chine ces dernières années prouvent que le socialisme à la chinoise a ouvert sa voie vers la modernisation aux pays en développement, en fournissant la sagesse chinoise et les solutions chinoises aux problèmes de l'humanité, a déclaré M. Xi.

Severino Cabral, chef de l'Institut brésilien des études sur la Chine et l'Asie-Pacifique, a déclaré que ce que la Chine a réalisé en assurant les progrès sociaux et l'amélioration remarquable du niveau de vie de son peuple force l'admiration du monde.

Principal pays en développement avec 1,3 milliard d'habitants, la Chine s'est progressivement engagée avec succès sur la voie de la réduction de la pauvreté par le biais du développement avec les caractéristiques du pays.

"Le modèle de la croissance chinoise et le style de gouvernance du pays ont inspiré d'autres pays, et les propositions chinoises pour un développement commun ont rencontré un écho de plus en plus favorable, face à une instabilité de l'économie internationale et de la sécurité du monde", a fait savoir M. Cabral.

Ce qui se passe en Chine ne doit pas et ne devrait pas se limiter à la Chine. Les réussites de la Chine en matière de lutte contre la pauvreté ont attiré l'attention du monde.

En octobre dernier, des fonctionnaires de 15 pays en développement, dont le Malawi, le Ghana et le Kenya, sont venus dans la capitale chinoise pour participer à un séminaire sur le service public et sur la réduction de la pauvreté destiné aux pays en développement.

"La Chine est un pays avec une population importante, des fondations économiques faibles et un développement déséquilibré. Quasiment chacun de ses problèmes impliquant la vie de la population est aussi une question internationale difficile", analyse Wang Jun, chef du département de l'information du Centre pour les échanges économiques internationaux de Chine.

"Le long chemin vers une société modérément prospère, processus durant lequel on découvre sans cesse des problèmes qu'il faut alors régler, peut fournir une formule chinoise pour les pays les moins développés qui sont confrontés aux mêmes questions", indique M. Wang. "Elle peut même bouleverser leur destin".

(Rédacteurs :Yishuang Liu, Wei SHAN)
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