C'est un endroit du Nord-est de la France très tranquille et qui ne paie pas vraiment de mine, et qui se trouve juste à côté d'un rond-point. Ici doivent être construits de nouveaux bâtiments commerciaux, pourtant c'est là précisément, dans ce petit village qui s'appelle Lavau, que les chercheurs de l'Institut national de recherches archéologiques préventives fouillent, depuis l'automne de l'année dernière, une tombe princière du Ve siècle avant notre ère, et cette trouvaille semble manifestement être l'une des plus remarquables de la culture celte de la période dite du Hallstatt (entre 800 et 450 avant J.-C.).
Ce n'est que mercredi que cette découverte qualifiée d'« exceptionnelle » par les archéologues, tant par les dimensions du site que par la qualité du matériel mis au jour, a été annoncée : un grand chaudron à vin, un riche pichet, une passoire, des récipients pour recevoir le précieux breuvage, tout ce qu'il faut pour un banquet fastueux. C'est déjà formidable, mais on imagine ce que pourrait être la suite, quand on sait que les fouilles du caveau ne sont pas encore achevées et qu'elles offriront sans doute de nouvelles surprises.
Les archéologues ont déjà mis au jour des objets de prestige qui font de la tombe de Lavau une trouvaille similaire à celles de Hochdorf, en Allemagne, ou de la célèbre tombe de Vix, découverte en 1953 en Bourgogne. La plus belle pièce exhumée jusque-là est un vaste chaudron de bronze, d'environ un mètre de diamètre, finement ouvragé et dont les quatre anses sont ornées de têtes cornues du dieu grec Acheloos, et qui, selon l'archéologue Emilie Millet, responsable du mobilier pourrait probablement être de fabrication étrusque, ou peut-être grecque.
Le défunt, dont les restes n'ont pas encore été dégagés, repose avec son char au cœur d'une chambre funéraire de 14 mètres carrés. Selon Dominique Garcia, président de l'Inrap, «Il s'agissait probablement d'un prince celte local», la présence d'un grand couteau dans son fourreau laissant supposer qu'il s'agit d'un homme. Mais il y a d'autres objets de prestige, la plupart en provenance du monde méditerranéen, témoignant du pouvoir économique et politique de ce seigneur celte. Notamment un vase à boire de fabrication grecque –une oenochoe– qui a été retrouvé dans le chaudron et est une pièce sans équivalent. Ce vase de céramique noire, utilisé pour prélever le vin dans le chaudron au cours du banquet, est rehaussé, à son pied et à sa lèvre, d'une tôle d'or. Comme le note l'archéologue Dominique Garcia, professeur à l'université d'Aix-Marseille « Même dans les riches tombes grecques on ne retrouve pas de tels objets ».