Près de deux semaines après l'attaque meurtrière contre le journal Charlie Hebdo, l'affaire continue de susciter des débats à travers le monde. Radio France internationale (RFI), qui fait l'apologie du mouvement "Je suis Charlie", a récemment publié sur son site en langue chinoise un article montrant du doigt les médias chinois.
Suite à un article de l'agence Xinhua pointant les nécessaires limites à apporter à la liberté de la presse, RFI a indiqué dans un commentaire que "les médias officiels chinois n'avaient pas fait preuve de la moindre sympathie envers les victimes des attentats terroristes à Paris".
Cette remarque est dénuée de tout fondement. Comme cela est souligné au début de l'article de Xinhua, quelles que soient les justifications données aux attaques, cet odieux massacre doit être fermement condamné.
Fait à noter également, juste après l'attentat, le président chinois Xi Jinping ainsi que le Premier ministre chinois Li Keqiang ont tous deux envoyé un message à leurs homologues français pour présenter leurs condoléances aux familles des victimes et réaffirmer leur engagement dans la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes.
Les médias chinois ont exprimé leurs sympathies, mais ils cherchent également à approfondir la réflexion sur la violence terroriste, en soulignant que "toute liberté d'expression sans principe et sans limite ne sera pas tolérée".
Les faits parlent d'eux-mêmes. S'en tenant à la soi-disant "liberté de parole", Charlie Hebdo a une nouvelle fois publié le 14 janvier des caricatures du prophète Mahomet, ce qui a suscité un nouveau tollé dans le monde musulman, allant jusqu'à provoquer des émeutes dans certains pays.
La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres. Tout en condamnant le terrorisme, les médias chinois se penchent également sur les conséquences que peut avoir "la liberté de parole absolue".
La multiplication des attaques terroristes au cours des dernières années en Europe, autrefois considérée comme la région la plus sûre du monde, ne mérite-elle pas des réflexions approfondies ?
Une bonne partie des musulmans de France sont issus de l'immigration en provenance des pays d'Afrique du Nord. Le passé colonial pèse encore fortement dans les esprits, et beaucoup d'entre eux sont défavorisés et marginalisés sur les plans économique, politique et culturel. Dans une telle situation, si leur religion n'est pas respectée, la violence sera inévitable.
C'est un peu dans le même esprit que le pape François est lui aussi intervenu dans le débat sur la liberté d'expression. "Tuer au nom de Dieu" est une "aberration". La liberté d'expression doit s'exercer "sans offenser", car "si un grand ami parle mal de ma mère, il peut s'attendre à un coup de poing, et c'est normal. On ne peut provoquer, on ne peut insulter la foi des autres, on ne peut la tourner en dérision !", a-t-il déclaré.
Même chez les Français, 42 % estiment qu'il faut éviter de publier des caricatures du prophète Mahomet, et 50 % se déclarent favorables à "une limitation de la liberté d'expression sur Internet et les réseaux sociaux", montre un dernier sondage Ifop publié dans le Journal du Dimanche.
Imposer "Je suis Charlie" revient à dévier de la liberté d'expression elle-même. Après l'affaire Charlie Hebdo, le Washington Post a décidé de ne pas reproduire de caricatures du prophète de l'Islam. Ceci mérite également réflexion dans le débat médiatique français.